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La tendresse

Le soir, en rentrant du travail, Florence me pose un baiser sur la joue, heureuse que son maladroit de mari réussisse de nouveau ce qu’un enfant de trois ans accomplit sans difficulté. Magnifique Florence ! Avec elle tout est facile, et pourtant nous n’aurions jamais dû nous rencontrer. Quand j’y pense ! Mes parents souhaitaient pour moi selon leurs convictions un «beau et bon mariage» avec une « épouse idéale » à leurs yeux, c’est à dire d’un milieu social équivalent, bourgeois si possible, mais surtout catholique pratiquant. Il ne me serait jamais venu à l’esprit de les contrarier. Le petit Eric avait tant souffert durant plus de trois ans de n’avoir aucune famille, qu’une fois « chez les Hilger », devenu « Michel » il n’avait qu’une obsession : être accepté, les remercier, les « combler » voulant avant tout les rendre fiers, quitte à embellir la réalité par quelques petits mensonges. Le jeune adulte qu’il était devenu avait osé désobéir dans le choix de son métier, il était donc disposé à accepter un mariage qui leur conviendrait.
Après avoir fait mon Service Militaire dans « l’Orchestre de la Garde Républicaine » grâce à Roger Boutry qui m’avait pris sous sa protection, pensant m’enrôler dans des « cercles d’influences souterraines », il m’a admis dans sa classe d’écriture et d’orchestration puis assez rapidement, j’ai été enrôlé dans un orchestre d’affaires destiné à enregistrer de nombreuses émissions de télévisions, de musiques de film, de publicités, ou de variété. C’est ainsi que j’ai approché tout jeune et de très près d’illustres noms, en particulier Michel Legrand, Vladimir Cosma, Charles Aznavour, Gilbert Bécaud, Michel Sardou, Michel Fugain, Patricia Kaas, Stéphanie de Monaco, Didier Barbelivien, Sylvie Vartan, Dominique Magloire pour ne citer qu’eux. Petit à petit, comme mon protecteur leur avait dit qu’en plus d’être excellent altiste au son généreux, j’étais également un arrangeur et surtout un bon orchestrateur. A partir de ce moment je suis devenu le nègre de beaucoup de grandes personnalités du monde du spectacle. Je parcourais déjà le pays avec  « l’Orchestre de La Garde », celui d’Alexandre Stajic, soutenu par la Région d’Ile de France, les « Concerts Pasdeloup »,  « L’orchestre du Marais »,  « l’Orchestre Symphonique de France » avec qui j’ai enregistré en soliste les « Concerti Brandebourgeois »  de Jean Sébastien Bach et avec mon  « Quintette de France » (cordes et piano)  que je venais de créer avec des amis et qui avait obtenu le prix de « La Fondation Menuhin ». Tout cela convenait du coup très bien à mes parents, mais le mariage était une affaire autrement sérieuse.
A vingt trois ans, ils commençaient à s’inquiéter car je n’avais pas encore rencontré la jeune fille idéale, alors, ils m’inscrivirent dans une agence matrimoniale de standing recommandée par la revue « Famille Chrétienne ». C’est ainsi que je rencontrais plusieurs jeunes filles qui entreprenaient les mêmes démarches que moi. Mon choix s’arrêta sur Marion qui envisageait de reprendre la très belle entreprise paternelle dans la facture et la commercialisation de mobilier de luxe et propriétaire de magasins d’antiquités. Elle était mignonne, très bon chic bon genre, bien éduquée, pratiquante et parlait plusieurs langues. Elle aimait « Les carrés Hermès » dont elle faisait la collection. Nous nous entendions très bien et nous décidâmes de nous fiancer. Ses parents m’accueillirent très chaleureusement. J’étais un ancien musicien de la « Garde Républicaine » Professeur d’Alto du «  Conservatoire National de Région de Metz  et universitaire de « L’Ecole Pratique des Hautes Etudes de Paris Sorbonne » cela leur suffisait. Ils se mirent en quête de rassembler le mobilier de notre future habitation. De même, ma jeune fiancée fut très bien accueillie par mes parents, même si les Hilger comprirent vite qu’ils étaient loin de posséder le patrimoine de sa famille. Mes parents et Manet firent fabriquer une très belle bague de fiançailles. Tout semblait aller pour le mieux !
Je partis en tournée d’été avec « l’Orchestre Alexandre Stajic » et mes quintettes. Les noces étaient prévues pour le 5 septembre 1989 en la belle église historique et imposante Saint Pierre de Dreux. Les faire-part furent imprimés.
Et patatrac ! Un différent avec la mère de ma fiancée concernant les préparatifs et toute l’organisation de l’événement fit tout capoter. Le mariage fut annulé ! Sur le coup j’étais furieux ! Marion et moi étions des jeunes gens trop obéissants pour s’opposer aux volontés parentales. Je me dis que nous n’étions probablement pas très décidés. Ma jolie et jeune gitane de Sainte Marie de la Mer que je n’avais pas crue me l’avait pourtant prédit quelques semaines auparavant.
C’est ainsi que Florence est entrée le 11 Novembre de cette même année dans l’Eglise Saint Martin de Suçy-en-Brie, mais également dans mon cœur et dans ma vie.